lundi 24 juillet 2017

Le tour du monde du roi Zibeline de Jean-Christophe Rufin

Ah, le beau roman que voilà ! Récit d'aventures, roman au substrat historique, roman initiatique et choral, histoire d'amour, c'est tout ça que Jean-Christophe Rufin nous propose en suivant la circumnavigation du roi Zibeline qui n'est autre que le comte Auguste Benjowski. Difficile de résumer le parcours haut en couleurs de ce célèbre aventurier du XVIIIème siècle dont les mémoires ont servi de base au travail de l'auteur. Il part d'un domaine de Hongrie, guerroie en Europe centrale, s'enlise dans l'exil aux confins de la Sibérie, plus précisément au Kamtchatka, rencontre la fille du gouverneur, Aphanasie (quel prénom !),  pour se poursuivre à la faveur d'une évasion risquée par un périple maritime dans le Pacifique Nord (après Béring mais avant La Pérouse) et l'Océan indien. Fort de nouvelles connaissances géographiques et cartographiques, il tente de négocier ses précieuses découvertes auprès de la France. L'époque donne alors la part belle aux explorateurs afin d'ouvrir de nouvelles voies commerciales dans une logique déjà bien installée de concurrence entre les puissances. Notre aventurier obtient finalement assez laborieusement (on se méfie de ses ambitions) la possibilité de s'établir à Madagascar et y fonde un royaume sur les principes éclairés de la philosophie des Lumières. C'est évidemment la version romancée que nous propose Jean-Christophe Rufin, présentant son personnage sous un jour favorable, l'Histoire ayant retenu, quant à elle, une vision plus controversée. 
En plus du palpitant récit d'aventures, j'ai beaucoup aimé la symbiose entre l'écriture et le propos. En effet, l'auteur qui fait parler tour à tour ses personnages, Auguste et Aphanasie, tous deux imprégnés des idées des philosophes a réussi à restituer le phrasé et l'esprit d'une époque. Mieux encore, il parvient à nous proposer une variante masculine et une variante féminine. Mention spéciale d'ailleurs pour cette dernière, dont l'écriture tout en finesse psychologique permet l'expression d'une vision somme toute moderne de l'amour et du couple. Aphanasie entend être la compagne, l'aimée, qui prend part aux décisions mais jamais n'aliène la liberté de l'autre. Le rôle rassurant et conventionnel de l'épouse ne l'intéresse guère s'il doit s'exercer au détriment de l'équilibre de cette relation. Je ne sais si les femmes du XVIIIème siècle pouvaient réellement se permettre ce genre de libertés mais il est cependant intéressant d'imaginer leurs espoirs et ambitions. A chacun ses conquêtes...

2 commentaires:

  1. Un vrai roman d'aventures ? C'est toujours bon à prendre !

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    1. Oui, je trouve que la littérature, c'est ça aussi. Dépaysement garanti. Mais celui-ci est également assez réflexif.

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